Dessinatrice, scénariste, étudiante en master de droit travaillant étroitement avec le ministère de la jeunesse en Côte d’Ivoire afin de développer le tourisme ou encore première dauphine d’un concours de leadership lié à la beauté intellectuelle, Marilyse Gouamené est une personne qui multiplie les projets. Leurs points communs ? La jeune femme de 24 ans donne à chaque fois le meilleur d’elle-même pour les accomplir et n’abandonne jamais, jusqu’à ce qu’elle réussisse. Une discipline qui s’est forgée dans son esprit suite aux innombrables shōnens qu’elle a lus et regardés à la télé depuis sa plus tendre enfance. Le 11 avril 2022, son travail acharné lui permet de réaliser l’un de ses rêves : sortir son tout premier livre intitulé KYODAI Académie : initiation au dessin Manga. En exclusivité pour ses lecteurs, le Mag’ison a prêté son micro à cette autrice ivoirienne ambitieuse bien décidée à faire briller la culture manga dans son pays.
Mag’ison : Bonjour Marilyse, comment allez-vous ? D’abord une question de curiosité, comment est arrivée en vous la passion des mangas ?
Marilyse : Bonjour, moi ça va très bien merci ! Eh bien ça, je dois dire que c’est vraiment à cause de mon père. J’ai été matrixée, il ne regardait que ça ! Dans mes plus lointains souvenirs, à 2 ans ou même à 1 an, je me rappelle être assise à côté de lui en train de regarder Les Chevaliers du Zodiaque ou Ken le Survivant. Il chantait les génériques à tue-tête ! Aujourd’hui c’est drôle, c’est moi qui lui fait découvrir des œuvres. Par exemple, je lui ai montré L’Attaque des Titans et il a adoré.
Mag’ison : Effectivement, quand on baigne autant dans un univers, il est logique qu’il nous influence ! Pouvez-vous nous en dire plus sur votre livre KYODAI Académie : initiation au dessin Manga et ce qui vous a motivée à l’écrire ?
Marilyse : En fait, je me rendais souvent à des conventions de bandes dessinées et de mangas dans lesquelles je ramenais mes créations, mes dessins. C’est là que j’ai vu qu’ils attisaient la curiosité des gens. “Est-ce que vous pouvez m’apprendre à dessiner ?” est une phrase que j’ai entendu beaucoup de fois. En plus, les gens étaient curieux de voir une femme qui dessine des shōnens, qui sont de base destinés à un public masculin. J’ai commencé à organiser des formations auprès de jeunes dans lesquelles j’avais de bons retours, et puis j’ai fini par me dire “Pourquoi ne pas codifier cela par écrit pas à pas ?” J’ai donc pendant longtemps préparé ce guide qui est un ba.ba pour créer des personnages de mangas crédibles avec tous les codes pour les dessiner de la tête aux pieds dans un style “manga”.
Le Mag’ison : Cela montre bien que les mangas ne cessent de gagner en popularité en Afrique. Comment avez-vous observé cette évolution et quelle est votre vision de la place des mangas dans la culture africaine ?
Marilyse : Ça a été vraiment rapide ! Il y a quelques années, on n’était pas nombreux dans la communauté manga en Côte d’Ivoire. Il y a un préjugé ici qui est que lorsque l’on regarde des animes ou qu’on lit des mangas à mon âge, on nous considère comme des immatures. Heureusement, ça arrive de moins en moins. Les jeunes générations veulent un vent de fraîcheur en Côte d’Ivoire et on découvre de plus en plus toute une culture japonaise qui nous ouvre aussi sur le monde. Des nouvelles branches spécialisées en manga sont en train de s’ouvrir dans les maisons d’édition en Afrique et c’est super !
Mag’ison : Quelles sont les valeurs que vous souhaitez transmettre à travers vos œuvres et vos cours ?
Marilyse : Ne jamais abandonner ! Quand on a un rêve, il faut mettre toute sa volonté pour le réaliser ! Je veux aussi montrer qu’une passion n’est pas associée à un sexe. Une femme qui dessine des mangas, cela ne devrait pas choquer. Et puis, pourquoi ce serait toujours les femmes qui dessinent les shōjos et les hommes qui s’occupent des shōnens ? Une femme peut très bien faire un dessin rempli de testostérone ! À ma première masterclass, sur 10 élèves, j’ai eu 9 filles. Ça m’a émue, je leur ai dit de ne jamais avoir honte d’aimer les shōnens !
Le Mag’ison : Pouvez-vous partager votre plus belle anecdote liée à vos cours de dessin ou à votre propre expérience de création de mangas ?
Marilyse : Il y a beaucoup de moments positifs, mais il y a une scène qui m’a vraiment marquée. Je sortais de la messe le dimanche et une dame m’a klaxonné. Elle m’a dit qu’elle connaissait mon travail et que si je venais à l’anniversaire de son fils qui allait avoir 12 ans, ce serait son plus beau cadeau d’anniversaire. J’y suis allée, j’ai été surprise par l’accueil car il était tellement heureux qu’il m’a montré tous ses dessins et croquis qu’il avait fait en suivant les étapes de mon livre. J’ai réalisé que je pouvais avoir un impact positif important sur les gens et ça m’a touchée !
Forte de son premier succès, Marilyse travaille désormais sur la création de son propre manga et a déjà signé avec une maison d’édition. Sans trop nous en dévoiler, elle a révélé sans surprises que ce serait un shōnen et que son récit prendrait place dans la ville d’Abidjan. Un vent nouveau se lève sur la scène manga africaine et il faudra patienter au moins jusqu’en 2024 afin de découvrir ce nouveau shōnen 100 % made in Côte d’Ivoire qui s’annonce exaltant !